Besoin d’ONU, besoin d’ONG libres

La journée mondiale des Nations Unies célèbre l’anniversaire de l’adoption de la Charte de l’Organisation le 24 octobre 1945. En 2023, cette célébration s’est déroulée à bas bruit alors que la poursuite de la guerre en Ukraine et la guerre que se livrent Israël et le Hamas annoncent de nouveaux drames et faisait refleurir la question récurrente à quoi sert l’ONU ? L’occasion d’un rapide bilan et d’une alerte.

Un bilan

Malgré les périodes de blocage du Conseil de sécurité, les Nations Unies n’ont pas cessé d’être le lieu unique où l’ensemble des pays du monde prennent conscience des problèmes qu’aucun d’eux ne peut résoudre seul, où ils débattent de leurs causes et murissent des remèdes. In fine, en fonction de la perception que chaque État a de ses intérêts, naissent des résolutions peu contraignantes ou des conventions qui le sont. Droits de l’Homme, droits de l’enfant, droit au développement, à l’éducation, au logement, égalité hommes-femmes, lutte contre la pauvreté, les grandes pandémies, le réchauffement climatique et la détérioration de la biodiversité, obligation de protéger, interdiction absolue de la torture…

L’ONU assiste les gouvernements qui le demandent à mettre en œuvre les dispositions de la Charte, les politiques et les conventions adoptées. Quoi qu’il en soit, ces propositions de l’ONU se répandent, transforment les aspirations des peuples et les comportements des acteurs publics à travers le monde. Parfois, de façon regrettable, des régimes autoritaires ou non durcissent leur système répressif contre ceux qui demandent le respect de ces droits (migrants, réfugiés, défenseurs des droits de l’homme notamment).

Ce bilan globalement positif est plus nuancé quand il s’agit de la première mission de l’ONU, le maintien de la paix. Les guerres en cours ajoutées aux quelques 160 conflits depuis 1945 avec plus de 25 millions de morts sont autant d’échecs. Ils ne sauraient cependant masquer les conflits évités grâce aux initiatives du Secrétaire Général, du Conseil de Sécurité ou de l’Assemblée Générale pour apaiser les tensions avant qu’elles ne s’enveniment. En cas de conflit, la diplomatie onusienne tente de convaincre les belligérants de mettre fin aux hostilités et de rechercher un règlement pacifique. Un cessez-le feu obtenu, le Conseil de Sécurité peut, si les belligérants en conviennent, déployer des observateurs de l’ONU ou des casques bleus afin de veiller au respect du cessez-le-feu, de sécuriser une frontière et, en cas de guerre civile, d’aider au désarmement des combattants et, éventuellement, au bon déroulement d’élections.

Certains conflits n’aboutissent pas à des accords de paix et obligent l’ONU à maintenir des observateurs, des forces d’urgence ou de maintien de la Paix. Créé en 1949, l’UNWRA, Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient, apporte éducation, soins, services sociaux et secours d’urgence. Comme le dit son Secrétaire Général, Philippe Lazzarini, l’UNRWA agit pour donner tout son sens à l’expression “dignité humaine” pour les réfugiés palestiniens y compris ceux réfugiés sur leurs terres.

Une alerte

Rendre le Conseil de sécurité plus représentatif de la réalité du monde d’aujourd’hui et restreindre l’usage du droit de veto, mieux coordonner le travail des diverses Agences de l’ONU sont dans les réformes à faire. On sait que cela ne sera pas facile et prendra encore du temps. S’il est une nécessité immédiate, c’est de préserver et de renforcer les liens entre les Nations Unies et les Organisations de la Société Civile, qui donnent du contenu aux quatre premiers mots de la Charte « Nous peuples des nations-Unies » et qui sont nécessaires à la vitalité des nations Unies et à la défense de ses principes.

Le bilan qui vient d’être esquissé est bien sûr l’œuvre du Secrétariat, des délégations qui représentent les États dans les réunions et négociations. Il est aussi celui des multiples organisations non-gouvernementales auxquelles le Secrétariat fait appel. Initialement les ONG ont surtout été des partenaires de l’ONU pour mettre en œuvre des projets sur le terrain. Elles ont commencé à jouer un rôle politique en mobilisant les opinions publiques dans leurs pays et dans ceux dans lesquels elles opéraient pour que soient pris en compte les principes et politiques préconisés par l’ONU, puis elles ont tenté d’influencer les débats internationaux et les négociations. Elles ont progressivement été à l’origine de propositions qui ont été retenues ou non. Dans les cas où est examinée la manière dont un pays met en œuvre une convention qu’il a ratifiée, des ONG de ce pays peuvent présenter des contre rapports face à celui du gouvernement.

Les ONG contribuent ainsi à la diffusion des idées et principes de l’ONU, au respect des engagements, à la vitalité du débat. Cela irrite nombre de pays, mais il ne faudrait pas les laisser restreindre la place qu’ont progressivement prise les ONG dans la vie de l’ONU. La Chine, la Russie, l’Inde et bien d’autres les harcèlent et tentent de les faire taire à l’intérieur comme à l’extérieur, l’Europe ne doit pas laisser faire ce qui laisserait bien des peuples sans voix dans le débat international.

Yves Berthelot

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