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Faits marquants – Economie et Social

Synthèse du forum 5 « Economie et social » de la session 2004 des Semaines Sociales de France, « L’Europe, une société à inventer ».

Forum riche, innovant, diversifié : c’est bien pour l’avenir, mais c’est la galère pour le rapporteur qui n’a que quelques minutes pour restituer un tel foisonnement d’idées. Je me lance quand même. Deux idées forces et un envoi : – Première idée force : le modèle social européen est en recul mais il est sauvable si nous savons l’adapter. Voilà pour le modèle social. – Deuxième idée force : le modèle économique européen et occidental n’est pas exportable, n’est pas transposable à la planète, mais un nouveau projet de société est possible. 1) Commençons donc par le modèle social de l’Europe. Ce modèle est en recul essentiellement à cause de la compétitivité à l’échelle mondiale, du vieillissement de la population et des changements rapides des technologies : citons le démantèlement des systèmes de retraites et d’assurances maladie ; le chômage, la précarité et l’exclusion ; le dumping social et les délocalisations que dénoncent les syndicats de l’ouest européen mais aussi, en un certain sens, le syndicat roumain Cartel-Alpha, Cartel-Alpha qui trouve que les avantages sociaux ne sont pas, eux, délocalisés puisqu’il s’agit de profiter longtemps des bas salaires. D’abord tous l’ont dit, se ressourcer aux valeurs fondatrices du modèle européen, qui en grande partie, sont les valeurs sociales chrétiennes : respect de la dignité de la personne qui n’est pas une marchandise, subsidiarité pour redonner vie aux partenaires sociaux, solidarité mais solidarité d’hommes et de femmes responsables, c’est à dire, entre autres, comptables des recettes et des dépenses de la protection sociale (exemple : prendre 1% sur la retraite par capitalisation pour équilibrer la retraite par répartition). Ressourcement éthique pour aller jusqu’à l’économie solidaire, le commerce équitable, les capitaux éthiques et même resourcement spirituel pouvant aller jusqu’à l’économie du don. Mais il faut aussi renforcer le contrôle des travailleurs et on a évoqué la participation à la gestion des entreprises ou le rôle encore trop faible des comités de groupes européens. Il s’agit plus profondément de la gouvernance des entreprises en y associant toutes les parties prenantes, pour donner une réalité à ce qu’on nomme la responsabilité sociale des entreprises citoyennes. Car le profit ne saurait être le seul but de l’entreprise. Il n’est, pour s’en convaincre que de poser la question : « pourquoi devient-on entrepreneur ? ». Réponse : « pour le profit sans doute, mais aussi pour le challenge de réaliser un projet ou pour le bonheur de créer des équipes, c’est à dire du lien social ». Contre les délocalisations en Europe, tendre vers une harmonisation fiscale ; et plus généralement, contre l’impuissance de l’Union Européenne, accroître le malheureux 1% du PIB qui constitue le ridicule budget européen. Développer le processus de Lisbonne, c’est à dire développer l’industrie de la connaissance et le droit à la formation, seules chances de l’Europe. Enfin resécuriser le monde du travail en remplaçant la sécurité de toute une carrière dans le même emploi, hier, par la sécurité d’un statut du travailleur qui laissera à chaque personne, en permanence, le choix libre et responsable d’un éventail d’activités, comprenant entre autre la formation continue sur toute une vie. Ce statut du travailleur était déjà l’une des conclusions des SSF en l’an 2000. 2) Deuxième idée force : le modèle de richesses économiques européen n’est pas transposable à la planète mais un nouveau projet de société est possible : le développement durable. Dès la fin du 19ème siècle, le développement durable se définit comme la satisfaction des besoins de la génération actuelle sans remettre en cause la satisfaction des besoins des générations futures. En général, les erreurs de politique économique sont graves mais pas trop graves car on peut les corriger. En écologie, les erreurs risquent bien d’être irréversibles d’où le fameux principe de précaution, qui s’applique par exemple, mais sans panique démagogique, aux OGM. C’est ainsi que si les Chinois viennent à avoir, ne serait-ce que le quart de notre parc automobile par habitant, l’air et le climat deviennent invivables. Notre modèle n’est donc pas universel. A cet égard l’Europe doit continuer d’être innovante comme à Kyoto qu’Américains et Russes continuent à bouder. Il faut aller plus loin jusqu’à le création d’une agence mondiale de l’environnement dotée de pouvoirs réels. De même, vis à vis des pays pauvres, peut-être créer des taxes sur les Bourses ou sur le carbone. Mais c’est encore insuffisant, il ne suffit pas de sauter comme un cabri en répétant développement durable, développement durable, développement durable. Nous devons nous convertir, nous devons changer nos modes de représentation du bonheur. Il n’est ni écologique, ni évangélique, de miser tout notre soi disant bonheur sur des besoins matériels. Ecologiquement et évangéliquement, ce qui est durable ce sont les biens relationnels, et les biens spirituels qui donnent à nos vies du sens. Notre pénurie occidentale est celle du sens de la vie sans lequel notre jeunesse est condamnée au désenchantement. Inaccessible étoile ? Utopie ? Pas sûr. Sachons donner des signaux : l’intervention de Jean-Baptiste de Foucauld a donné une idée à Jean Boissonnat : « Reprenons dit-il l’idée d’une journée sans voiture et disons aux chrétiens : pendant la Semaine Sainte, laissons un jour notre voitures au garage ». Voilà un signe. 3) J’en viens donc à l’envoi : – les deux idées forces, celle sur le modèle social et celle sur le modèle de richesses économiques se conjuguent dans le projet de développement durable qui réconcilie l’économique, le social, l’écologique et sans doute le spirituel. – que l’Europe renouvelle ce qu’elle a toujours été : une terre d’innovation sociale. – Et si le monde venait à désespérer, que les chrétiens témoignent de cette parole de Saint-Paul parlant d’Abraham : « espérant contre toute espérance, il crut ».

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