Il n’y a pas de définition communément admise, ni nationale, ni internationale, du travail domestique. Je m’appuierai sur deux définitions : l’une restreinte (cuisine, ménage, soins matériels aux enfants, entretien du linge, gestion du ménage, accompagnement des enfants) l’autre plus large en rajoutant des activités plus proches du loisir (courses, jardinage, bricolage, jeux avec les enfants). Ces deux définitions sont utilisées dans les publications statistiques, notamment de l’INSEE. Il faut noter que ne sont inclues que les activités facilement délégables. Sont par exemple exclus les soins personnels. Est également exclu le temps de déplacement domicile-travail ainsi que le temps de transport personnel.
Les chiffres que je vais citer n’évoluent que très lentement et l’INSEE n’effectue une enquête sur le travail domestique qu’environ tous les 10 ans. En 2010 une personne adulte consacrait en moyenne 15h par semaine au travail domestique restreint et 21h30 au travail domestique plus large. Il s’agit de moyennes annuelles effectuées sur l’ensemble de la population adulte (y compris les personnes sans activité professionnelle) et sur l’année entière (week-ends et vacances compris). Il faut noter que le temps de travail rémunéré est de l’ordre de 15h par semaine, auquel il conviendrait d’ajouter le temps de déplacement domicile-travail. Ce dernier est de l’ordre de 50 minutes par jour travaillé mais il n’est guère possible de le différencier selon les critères qui seront utilisés par la suite. Le temps de travail rémunéré est comparable au temps de travail domestique restreint et nettement inférieur au temps de travail domestique plus large.
Il est intéressant de comparer hommes et femmes en couple avec enfants. En rajoutant au temps de travail domestique le temps de travail rémunéré, plus important pour les hommes, on obtient le temps de travail total. En 2010, ce temps était à peu près équivalent pour les hommes et les femmes avec la définition large du travail domestique. Il est par contre nettement supérieur pour les femmes (de l’ordre de 5h par semaine) avec la définition étroite. En effet les hommes privilégient les activités de jardinage et de bricolage. Les femmes avec enfants sont amenées à réduire leur activité rémunérée car elles doivent accroître fortement leur temps de travail domestique restreint. En revanche l’arrivée d’enfants ne modifie pas le temps de travail domestique des hommes mais augmente un peu leur temps de travail rémunéré. Il faut noter que le temps de travail domestique restreint baisse depuis longtemps d’environ ½ heure par jour tous les 10 ans chez les femmes et ne bouge pas chez les hommes. Il y a une réduction progressive de l’écart femmes-hommes dû à un effet « nouveau père » et surtout au développement des moyens de réduction du temps de travail domestique restreint (appareils électroménagers, plats préparés, livraisons à domicile, …). Si l’écart femmes-hommes du temps de travail domestique est appelé à se réduire encore, il reste une spécialisation forte des femmes au détriment du travail rémunéré et au profit des soins donnés aux enfants.
Malheureusement il n’est guère possible d’estimer la valeur du travail domestique, de la comparer par exemple à celle du travail rémunéré ou bien de faire des comparaisons internationales. Aussi vais-je m’arrêter là, laissant à chacun le soin d’interpréter ces chiffres.
Paul Champsaur, haut fonctionnaire