Dossier Tribune du Christianisme social

La tribune : Le froid de la guerre

Les chrétiens du monde entier viennent de célébrer la naissance du Fils de la Paix. Y compris dans maints pays qui ne connaissent que la guerre, les violences, l’insécurité, les persécutions, le déracinement… Pas de trêve pour le peuple ukrainien après dix mois de combats et de destructions massives. « Les vents de la guerre continuent à souffler le froid sur l’humanité », a ainsi affirmé le pape François dans son message Urbi et Orbi de Noël. Pour les Ukrainiens, le « froid » jeté sur leur pays n’est pas une simple métaphore mais la dure réalité de millions d’entre eux privés d’électricité. Le Pape a à nouveau développé le concept d’une troisième guerre mondiale se jouant sur tous les continents, signe d’une interdépendance des peuples et des territoires que déjà la pandémie avait mise en lumière. « Dans notre monde il n’y a plus seulement des “morceaux” de guerre dans tel ou tel pays, mais on affronte une “guerre mondiale par morceaux”, car les destins des pays sont fortement liés entre eux sur la scène mondiale (…) », expliquait-il dans l’encyclique Fratelli tutti. D’autant que souvent, ces morceaux de guerre sont menés directement ou indirectement par des grandes puissances militaires et économiques sur des terrains qui ne sont pas les leurs.

Pourtant, dénonçant la guerre « insensée » menée par la Russie de Vladimir Poutine contre l’Ukraine, le Pape exhorte toujours à rechercher les voies de la paix, quitte à être incompris. Nous ne sommes pas neutres, avait-il affirmé il y a quelques mois, nous sommes alignés pour la paix.

Son message s’adresse de fait et à la Ville et au Monde, car la paix se gagne aussi au plus près de nous, dans les familles, dans l’organisation sociale et politique d’un pays. La France n’est pas épargnée par les déchirures. Là encore pas de trêve de Noël (des confiseurs, dirons-nous, pour ne pas heurter la laïcité) pour les médecins généralistes, pour les hôpitaux publics, pour les contrôleurs de la SNCF. Pas de trêve pour les plus précaires que l’inflation, la hausse du coût de l’énergie fragilisent encore. Une question vaudrait d’être étudiée : la baisse de la consommation de l’électricité en décembre (moins 7%) est due certainement aux économies sur l’éclairage public, aux efforts des entreprise et des particuliers, mais parmi ces derniers, certains – les associations qui les accompagnent le savent bien – en souffrent plus que d’autres, contraints par exemple de ne se chauffer que quelques heures par jour. Tous égaux devant les sacrifices à consentir, certes, mais certains sont plus égaux que d’autres, disait Coluche.

Dans la lignée de la rencontre d’octobre à Lille, les Semaines Sociales de France nous appellent à faire de la fraternité notre combat. Un combat qui, s’appuyant sur la justice, doit mobiliser les puissants de ce monde, mais aussi chacun de nous. « Toute guerre laisse le monde pire que dans l’état où elle l’a trouvé. La guerre est toujours un échec de la politique et de l’humanité, une capitulation honteuse, une déroute devant les forces du mal. (…) », écrivait encore le pape François dans Fratelli tutti.

Dominique Quinio, présidente d’honneur des Semaines sociales de France

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