Dossier La Tribune du Christianisme social

La tribune : Un futur ouvert ou un pacte faustien ?

La prise de conscience de notre vulnérabilité extrême face à la crise actuelle génère inévitablement la question du « qu ‘est ce qui, pour chacun d  entre nous, hic et nunc est vraiment essentiel ? » quand le futur paraît obscur, que les repères manquent tout comme les perspectives. Il est donc nécessaire de réfléchir individuellement et collectivement à la société dans laquelle nous souhaitons vivre.

Certes, en ces temps difficiles et parfois surprenants, nous avons expérimenté notre capacité à nous relier les uns aux autres, à nous secourir, à dégager un potentiel d‘imagination, d’invention, de disponibilité pour autrui. Notre renoncement à l’importance excessive du regard sur soi nous a conduits souvent à habiter, dans un rapport de fraternité vraie, avec l’autre, notre semblable.

Il nous semble alors, être enfin prêts à ne plus exclure pour exister, et à partager vraiment. C ‘est une autre dimension dont nous découvrons la prégnance !

S ‘agit- il d’une transformation individuelle, collective, d’une découverte passagère, durable ?

Le non- savoir auquel nous faisons face , nous rend-il vraiment disponible à l’ a-venir ?

Sommes nous prêts à prendre notre part des épreuves qui nous attendent pour tenter de redessiner, remodeler, inventer, de nouvelles manières d’habiter notre terre ?

Face à ces interrogations très essentielles et ce retour à la source de ce qui fait notre humanité et notre lien au vivant, nous voyons se développer en même temps et de façon de plus en plus perceptible une sorte d’« Economie de la surveillance » qui nous traque en partie à notre insu et vient mordre sur notre individualité !

La santé est certes, un mobile puissant, face à la maladie, le besoin de soin, des autres… que ne ferait- on pour se sauver ou sauver ses proches !

Mais cela ne suffit pas pour expliquer comment nous nous sommes si facilement accoutumés à cette « surveillance » en perdant tout contrôle sur nos profils numériques, de nos données personnelles alors que nous laissons des « traces » électroniques souvent à notre insu partout et que de nouveaux acteurs aux intérêts divers et pas toujours bienveillants reconfigurent les paramètres de nos comportements en algorithmes pour en tirer profit ! Une chose est de nous savoir surveillés, une autre d ‘en comprendre la signification et les implication futures.

La crise actuelle a le mérite de rendre encore plus visible cette contradiction entre un retour à  l’humain dans ce qu‘il a de meilleur et une instrumentalisation accrue de notre être intime par la technologie. Il serait peut être utile d ‘en cartographier les nouveaux territoires pour tenter de trouver par la délibération collective et le débat une sorte d’« hygiène numérique » de bon aloi.

Comment nous libérer de notre accoutumance à la surveillance qui nous piège avec notre consentement aveugle ? Pourrons-nous sinon échapper, du moins, veiller à protéger et conserver ce qui nous rend dépendants les uns des autres et donc responsables du monde dans lequel nous souhaitons vivre ?

  1. Olivier Tesquet, A la trace ,premier parallèle, 2020
  2. Microsoft (USA) héberge notre base de données de santé…

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Marie-Noële Sicard, professeur d’Université en sciences de la communication

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