Dossier Tribune du Christianisme social

La tribune : Quelle place pour les pauvre aux CESE ?

Deux sièges sur 175 ! Les semaines Sociales de France regrettent profondément que le Conseil économique, social et environnemental réduise en son sein la représentation des associations qui luttent contre l’extrême pauvreté.

Une réforme du Conseil économique, social et environnemental était sans doute bienvenue, même si la loi organique de janvier 2021 qui en trace les contours ne fait pas l’unanimité. Il s’agit de faire de cette assemblée, censée représenter la société civile et équilibrer les pouvoirs du gouvernement et du Parlement, un lieu de démocratie participative, « un carrefour des consultations citoyennes » sur les domaines économiques, sociaux et environnementaux. Il lui est désormais possible, sur le modèle de la convention climat ou pour le travail sur la vaccination anti-Covid, de tirer au sort des citoyens. Par ailleurs, le droit de pétition auprès du CESE a été réformé (ouvert aux plus de 16 ans, avec un nombre de signataires passant de 500 000 à 150 000).

L’évolution ne convainc pas certains politiques qui jugent que seule l’élection (et non un tirage au sort) permet de représenter le peuple et pas non plus les partisans d’une démocratie participative qui estiment que la réforme ne va pas assez loin et ne garantit pas le rôle effectif qu’auront les propositions de ces comités citoyens.

Un nouvel épisode vient porter une ombre sur cette réforme qui devrait prendre effet dans quelques semaines. La réduction du nombre de conseillers (175 au lieu de 233) a modifié les équilibres : les sièges des représentants de la protection de la nature et de l’environnement sont portés de 18 à 26 ; 52 reviennent aux entreprises ainsi qu’aux syndicats, et 45 aux représentants de la vie associative (famille, jeunesse, solidarité). Dans ce créneau, les sièges dévolus aux associations luttant contre la pauvreté passent de trois à deux, l’un pour la Croix Rouge, l’autre pour le collectif Alerte qui regroupe 35 organisations. Le siège jusqu’ici occupé par ATD Quart Monde est supprimé.

Deux sièges sur 175 pour représenter les 15% de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, dans une instance appelée à représenter la société civile ! « La nouvelle composition n’offre pas aux populations précaires la juste représentation qu’elles sont en droit d’attendre », déplore le collectif Alerte. Et les représentants d’ATD Quart Monde rappellent, à juste titre, l’apport continu de leur mouvement à de très nombreux travaux. Les Semaines sociales s’en souviennent, qui pour leur rencontre sur l’éducation par exemple avaient pris appui sur ces travaux. Ou encore à Lille, en 2019, en donnant la parole à Claire Hédon sa présidente, devenue depuis Défenseure des droits.

Voilà un très mauvais signal pour cette assemblée « carrefour des consultations citoyennes », à un moment où, en raison de la pandémie, les pauvretés et les exclusions s’aggravent ; un mauvais signal quand on sait combien une association comme ATD Quart Monde a œuvré pour que soit entendue la parole des plus fragiles afin qu’ils puissent participer eux-mêmes aux solutions qui les concernent. Ne pourrait-on parler, à propos des pratiques de ce mouvement, de démocratie participative ? Il serait fort dommageable que le CESE, qui s’en voudrait le symbole, se prive de cette longue et féconde expérience. Quelle parole des plus pauvres au Cese, quelle parole des plus pauvres dans notre société ? Grave question pour le monde d’aujourd’hui et pour le « monde d’après».

Dominique Quinio, Présidente des Semaines sociales de France

Aujourd’hui, ATD Quart Monde, a besoin de votre soutien pour demander au gouvernement de renouveler leur siège au sein du CESE, afin qu’ils puissent continuer à y porter la voix des plus exclus!

Dans une tribune publiée le 11 avril 2021 dans Le Journal du Dimanche et sur change.org, plus de 40 représentants du monde universitaire, associatif et politique de tous bords ont montré leur soutien à ATD Quart Monde et demandé au gouvernement de revenir sur son choix. Le prochain mandat du CESE devant débuter début mai, le temps est compté.

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