Dossier Rencontres anuelles

Prologue : « Les religions : menace ou espoir pour nos sociétés ? »

Prologue de la session 2008 des Semaines Sociales de France : « Les religions, menace ou espoir pour nos sociétés ? »

GERARD COLLOMB, maire de Lyon

Pour la sixième fois, Lyon accueille les Semaines Sociales de France. Pour notre ville, c’est toujours un moment particulier puisque, comme vous l’avez rappelé, Monsieur le Président, c’est ici, à Lyon, qu’il y a plus d’un siècle, la Chronique Sociale de France lança ses assises. Depuis leur origine, ces rencontres privilégient l’écoute, le dialogue, l’ouverture, avec la volonté constante de mettre l’homme au cœur de tout projet, de toute réflexion. Les Semaines sociales de France ont inspiré, on le sait, quelques-unes des plus grandes conquêtes sociales de notre pays : l’assurance maladie universelle ; les allocations familiales; l’accès au logement pour les plus démunis ; l’éducation ; la famille ; la santé ; l’écologie ; l’Europe ; l’immigration ou le co-développement. Par leur réflexion, les Semaines sociales montrent toujours leur capacité à mettre la pensée en mouvement.

Le thème, cette année – « Les religions, menace ou espoir pour nos sociétés ? » – s’ancre donc dans la tradition de vos rencontres. Vous vous interrogez sans tabou face aux mutations de notre société pour débattre des grands enjeux : montée des tensions internationales, montée des intégrismes. Dans une période lourde d’incertitudes, on voit bien que le repli communautaire peut jeter le doute sur notre capacité à vivre ensemble dans la concorde et la solidarité. Pourtant, dans le même temps, l’actualité venue par exemple des États-Unis nous montre que l’espoir est permis, que des démocraties vivantes peuvent être porteuses d’un avenir plus serein, fait de respect, de tolérance, d’unité entre les hommes. Le thème de vos assises montre à quel point vos réflexions sont en phase avec les interrogations et les aspirations les plus profondes de notre temps. C’est pourquoi je suis heureux d’ouvrir avec vous ces rencontres, à la fois véritable université itinérante et laboratoire de la modernité sociale dans notre pays.

Oui, Mesdames et Messieurs, il existe à Lyon une tradition de dialogue entre les religions. Elle est même fondatrice de notre histoire ! C’est, avant la guerre, un abbé lyonnais, l’Abbé Couturier, qui jette les bases du premier dialogue entre catholiques et protestants. C’est, pendant la guerre, les Amitiés chrétiennes, qui réunissent catholiques et protestants dans la même volonté d’un sursaut spirituel contre l’occupant nazi, d’une aide commune aux juifs alors persécutés. C’est bien évidemment la grande figure du Cardinal Decourtray prenant position pour un acte fort de repentance de l’Église par rapport aux juifs et, en même temps, engageant les prémices d’un dialogue entre musulmans et chrétiens. C’est lui qui, par exemple, était venu dans notre Conseil municipal prendre position pour la création de la Grande Mosquée de Lyon ; il disait alors : « Ne cessons jamais de rappeler que seul le respect total peut fonder entre les hommes des relations de paix ».

Aujourd’hui, cette volonté s’incarne encore dans l’action que nous menons ensemble. Et lorsque le Cardinal de Lyon, le Président du Conseil Régional du Culte Musulman, le Recteur de la Grande Mosquée sont allés ensemble à Tibhirine pour se recueillir sur les tombes des sept moines trappistes assassinés, c’était évidemment un acte très fort. Oui, nous voulons vivre dans la concorde et la solidarité et donc nous nous reconnaissons dans l’esprit de dialogue qui était celui des Pères fondateurs de la Chronique Sociale de France : Marius Gonin, Victor Berne, Augustin Crétinon, Joseph Vialatoux, Emmanuel Gounot. Comme vous l’avez rappelé, Monsieur le Président, leur idéal émergeait dans un contexte historique, marqué par l’Encyclique Rerum Novarum, qui affirmait la volonté des catholiques de rendre toute sa dignité à la condition ouvrière. Il s’agissait déjà alors de jeter des ponts.

Aujourd’hui, c’est entre les hommes des différents continents, à travers les différentes religions qu’ils pratiquent, qu’il faut jeter ces ponts. Je crois que vos assises sont un témoignage fort de votre volonté commune mais, si vous le voulez bien, je dirais de notre volonté commune de faire en sorte qu’au travers de ce dialogue nous puissions jeter les bases d’un monde de paix pour le 21e siècle.

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