Dossier Rencontres anuelles

Technosciences, Les ateliers

Samedi 22 Novembre 2014 – L’homme et les technosciences – 89ème session

Echanger demain avec Alain Caillé, Patrick Cohendet, René Locqueneux et Pascal Percq

Entreprendre demain avec Thierry Cardinael et Philippe Vasseur

Gouverner demain avec Françoise Roure et Benjamin Sonntag

Transmettre demain avec Milad Doueihi, Patrice huerre et Luc Pasquier

Vivre demain avec Bruno Cazin, Claude Evin et Carole-Anne Rivière

Les ateliers se sont déroulés en deux temps : un temps de réflexion et de partage en petits groupes, évoqué ici sous forme de verbatim, autour d’un des cinq thèmes abordés : Échanger demain, Entreprendre demain, Gouverner demain, Transmettre demain, Vivre demain ; et un temps de mise en commun et de table ronde rassemblant les groupes par thématique.

ÉCHANGER DEMAIN

Des formes d’échanges s’éloignant du modèle standard de l’économie marchande se sont considérablement développées au cours de ces vingt dernières années : entreprises coopératives, mutuelles, scop, amap, épiceries solidaires, entreprises d’insertion, entreprises d’autoproduction industrielle etc. Avec Internet se développent aussi des modes de location, de prêt, de partage, de troc qui poussent à revoir notre économie centrée sur la production de biens. Que signifient ces nouvelles tendances ? L’acte d’échanger est un fondement des sociétés et bien sûr de leur économie. Des pratiques nouvelles, notamment liées aux nouvelles technologies, mais aussi un questionnement sur son sens et la critique des principes économiques dominants nous incitent à revenir sur cette notion fondamentale.

VERBATIM

Ambivalence de l’outil Internet pour gérer des échanges… On échange plus par les images que par la parole mais la parole seule reste incomplète … Quelle est la place du langage symbolique dans les technosciences ?… La gratuité est source de dynamisme, d’audace nécessaire pour créer. Comment préserver, voire favoriser la gratuité dans le monde de demain ?… Les réseaux d’échanges de savoir peuvent-ils avoir un impact sur l’inégalité des rapports sociaux ? Comment mesurer l’impact des échanges non marchands ?

Alain Caillé, professeur de sociologie et directeur de la revue MAUSS

Par où entrer dans ce vaste sujet ? J’avancerai une première réflexion sur l’idée même d’échange. Il nous faut échanger, bien sûr, mais on peut échanger beaucoup de choses, faire du troc, de l’échange marchand. Il me semble que nous aspirons à autre chose. Je vais faire référence à un auteur qui m’est cher et auquel se rapporte le mouvement du MAUSS (Mouvement anti-utilitariste en sciences sociales), mouvement anti-économiciste, qui s’oppose à la réduction de toute l’existence aux seuls problèmes économiques. Ce nom rend hommage à Marcel Mauss, héritier intellectuel et disciple d’Émile Durkheim, fondateur de la sociologie française. Dans son Essai sur le don, publié en 1925, il découvre que les sociétés premières ne reposent pas sur le marché, sur l’achat et la vente, ni sur le troc, mais sur la triple obligation de donner, recevoir et rendre. On ne devient proprement humain que si on sait s’insérer dans ce cycle du don et du contre-don. Ce don n’est pas de la charité, il contient même une certaine violence. Car obligation est faite de rivaliser de générosité, de s’afficher plus généreux que son rival. Ce n’est donc pas de la charité, mais c’est ce qui produit l’alliance et la paix sociale. Comment désigner ce don ? Mauss parle tantôt d’échange/don et tantôt de don/échange. Dans ce type de don, il s’agit de trouver le bon équilibre entre le don proprement dit, c’est-à-dire une part de gratuité dans les relations que nous nouons avec les autres, et une part d’échange dans laquelle tout le monde trouve son compte. Il s’agit d’articuler une dimension d’inconditionnalité, essentielle pour nouer le rapport social, et une dimension de conditionnalité.

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