Dossier Rencontres anuelles

L’expérience sociale et spirituelle des SSF au coeur du catholicisme social

Samedi 3 Novembre 2018 – Rencontres du christianisme social

Aux origines des Semaines sociales de France

Dominique Greiner, rédacteur en chef à La Croix et théologien.

Pour leur session 2018, les Semaines sociales de France ont choisi de prendre un temps d’arrêt pour envisager leur avenir. Or pour se projeter vers le futur, il est toujours bon de savoir d’où l’on vient. Le passage par l’histoire nous permet notamment de découvrir les ressources – philosophiques, théologiques, spirituelles… – qu’ont mobilisées ceux et celles qui nous ont précédés dans la foi pour faire face aux défis de leur temps. C’est dans cette perspective que je me suis intéressé à l’histoire des Semaines sociales pour essayer de comprendre les intuitions et les motivations de leurs fondateurs, comme leur enracinement spirituel. Je me suis donc plongé dans les décennies qui ont vu l’émergence du catholicisme social et je me suis laissé surprendre par la vitalité de ce mouvement porté avec foi par de nombreux laïcs sensibles à la question sociale [1].

ans le temps qui m’est imparti, je me contenterai de relever quelques traits de cette histoire qui peuvent stimuler l’imagination pour inventer l’avenir des Semaines sociales de France. Je commencerai par redire quelques éléments du contexte politique, social, économique, mais aussi ecclésial dans lequel elles sont nées (section 1). Je dirai ensuite l’originalité de leur démarche (section 2). Je poursuivrai avec quelques considérations sur le mouvement spirituel qui en est à l’origine (section 3). Je terminerai par quelques propositions pour l’avenir.

I – Un monde qui passe

Lorsque se tient la première session des Semaines sociales en 1904, nous sommes à quelques mois de la loi de 1905 de séparation de l’État et des Églises, quelques jours après la suspension des relations entre la France et le Saint-Siège sur fond de guerre scolaire, un an après l’expulsion des religieux en conséquence de la loi du 1er juillet 1901 sur les associations qui soumet les congrégations à un régime d’exception. Il faut remonter plus haut dans le siècle pour comprendre ce contexte général qui va aussi déterminer le projet et la méthode des Semaines sociales.

L’Église est sortie très affaiblie de la Révolution française et de ses contrecoups. Au XIXe siècle, elle cherche à retrouver une influence dans la société, à travers la formation d’une élite chrétienne. Mais le projet de « régénération catholique » ne rencontre pas le succès escompté. En effet, l’Église n’est guère équipée pour répondre aux défis d’un monde qui connaît des bouleversements majeurs sur le plan international (guerres napoléoniennes, guerres coloniales, guerre de 1870, perte des États pontificaux en 1870), politique (montée de l’idéal démocratique, libertés nouvelles par exemple en matière de presse), technique (progrès scientifique, machinisme…), économique et social (apparition des nouvelles formes de la propriété privée et publique, de nouvelles techniques de diffusion de la pensée, exode rural vers les vers les grands centres de production, fragilisation des solidarités sociales et familiales, sans parler des conditions de vie et de travail parfois déplorables…).

[…]

  1. La « question sociale » est une expression historique qui désigne la crise des relations entre capitalistes et prolétaires à la suite de la révolution industrielle de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle.

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