Dossier Rencontres anuelles

Crise de la transmission : la politique interpellée

Par Elisabeth Guigou et François Bayrou

Conférence donnée au cours de la session 2005 des Semaines sociales de France, «Transmettre, partager des valeurs, susciter des libertés»

Introduction à la matinée par Jean Boissonnat

Cette matinée est consacrée à l’écoute de grands témoins. Paul VI disait : « cette société écoute davantage les témoins que les maîtres ». Nous avons sollicité ces témoins dans le monde politique, puis dans le monde de l’Europe centrale, cette grande sœur qui nous a rejoints et nous a changés.

Accueillir des personnalités politiques est toujours prestigieux, quoi qu’on dise surtout dans notre pays, et difficile. On attend le présentateur pour repérer ses penchants particuliers. J’en ai. Les deux personnalités présentes aujourd’hui sont, qu’il me permette de le dire, des amis, bien qu’ils appartiennent à des familles différentes.

Le monde politique et les personnes politiques me paraissent dominés par deux caractéristiques liées à leur mission. Un : ce sont des élus du peuple. Deux : ils ont en charge le pouvoir d’Etat. Au milieu de toutes les caricatures de la vie politique – caricatures auxquelles nous avons bien droit sommes toutes – il ne faut jamais oublier ces deux données. Ces hommes et ces femmes se distinguent de toutes les autres, quoi qu’ils en pensent eux-mêmes, par le fait qu’ils sont des élus du peuple et qu’ils ont en charge le pouvoir d’État. À ces titres, ils ont une fonction particulière pour tout ce qui concerne la transmission dans nos sociétés. Nos deux invités le savent puisqu’ils viennent de vivre à un degré très élevé un échec de la transmission avec le non au référendum européen. Nous voyons bien que ce sont des tâches difficiles, pour lesquelles les hommes et les femmes qui s’y consacrent doivent être respectées.

Nos invités ont donc en charge ou prétendent à avoir en charge un jour, le pouvoir d’État. Ce pouvoir d’État renvoie à trois missions essentielles :

– incarner un groupe humain, qui a besoin, pour se savoir existant, de voir des hommes et des femmes qui l’incarnent.

– gérer cette collectivité dont ils représentent l’identité – ce qui n’est pas une mince affaire dans nos sociétés complexes, comme nous le voyons depuis le début de cette session. On ne gouverne plus simplement par la parole.

– donner une vision commune à ce groupe – ce qui est très difficile dans un monde où chacun veut garder sa propre vision.

Les pouvoirs autoritaires se saisissent aisément de cette fonction de visionnaire puisqu’ils retirent la parole à tous les autres. Mais les pouvoirs démocratiques, lorsqu’ils prétendent exprimer une vision des choses, se heurtent nécessairement à ce que chacun dise « c’est mon affaire ». Or, en tant que détenteur du pouvoir d’État, il y a là une mission particulière. Voilà pourquoi les deux témoins à cette table aujourd’hui sont indispensables si nous voulons appréhender complètement notre sujet de la transmission dans nos sociétés.

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