Dossier Rencontres anuelles

Les ateliers : aborder les religions et la culture par le dialogue

Samedi 3 Octobre 2015 – Religions et cultures, ressources pour imaginer le monde – 90ème session

En optant pour le thème « Religions et cultures, ressources pour imaginer le monde », les Semaines sociales mettaient la différence et la complémentarité au coeur des trois jours de rencontres. Il fallait que les ateliers fussent à leur tour, par leur ouverture au monde, par la variété des thèmes qu’ils proposaient, le miroir de ces différences qui sont autant de richesses.

« Partage », « métissage », « parité », « ensemble », « lien », « dialogue ». À eux seuls, ces mots qui reviennent de manière récurrente dans les titres des différents ateliers en disent long sur l’objectif de ces groupes de travail. Les trois substantifs que l’on retrouve le plus souvent « interreligieux », « interculturel » et « diversité », resituent le contexte. Il s’agit de se rencontrer, de dialoguer et non pas entre pairs, entre « mêmes, mais avec l’autre. Celui qui ne nous ressemble pas. Ou du moins le croyons-nous à première vue. Il ne s’agit pas de venir à la rencontre de l’autre dans un esprit de « tolérance », comme l’a rappelé Fadi Daou, car « lorsqu’on est dans la tolérance, on est parfois individualiste et condescendant ».  Il ne s’agit pas non plus de nier nos différences, de chercher le plus petit dénominateur commun entre nous tous, au risque de ne trouver de convergence que sur la base d’un pâle syncrétisme ou de quelques principes éthiques fondamentaux. Karim-Pierre, jeune militant de l’association Coexister nous l’a rappelé, citant Jean-Claude Guillebaud et ses réflexions sur la « force de conviction » : « On a fait fausse route en promouvant les ontologies faibles. C’est au contraire quand on a des convictions fortes et enracinées qu’on peut s’ouvrir à l’autre sans crainte. »

Ce sont près de 130 ateliers auxquels sont conviés les participants de ces Semaines sociales. Et il y en a pour tous les goûts. Deux grands ateliers, réunissant plusieurs centaines de personnes, reprennent des thèmes « historiques » pour les SSF : les personnes en grande précarité et le dialogue en entreprise. Mais ils sont aujourd’hui habillés de neuf. Le dialogue en entreprise, certes, mais sous l’angle du dialogue interreligieux. La précarité, oui, mais pour comprendre comment cette extrême pauvreté, tant dans nos pays que dans les pays en voie de développement, peut devenir une « ressource » pour des objectifs de développement durable. Cinq ateliers accueillant 30 à 40 personnes ouvrent sur la notion de l’autre au travers de « jeux » et d’ »expérimentations ». Et enfin, 120 petits ateliers en groupes restreints de 8 personnes proposent d’échanger, parler, faire connaissance, se découvrir. La majorité de ces ateliers rend compte d’actions ou de réflexion portées par des associations. D’autres sont structurés autour de témoignages. Plus de 40 structures ont mis la main à la pâte pour proposer des thèmes et en assurer l’animation. La variété des sujets est telle que chacun y trouvera aisément son bonheur. « Parents face aux différences culturelles » ou « La mort et le deuil selon les cultures » nous font pénétrer d’entrée de jeu au cœur de ces enjeux humains que sont la naissance et la mort et sur lesquels notre regard varie selon notre culture. Bien d’autres questions sont évoquées : la nutrition, les rencontres islamo-chrétiennes, le travail et les solidarités internationales, le volontariat international, la laïcité, le dialogue interreligieux dans les lycées, ou encore cette improbable « esplanade des religions » à Bussy-Saint-Georges, où, depuis 2012, bouddhistes, juifs, musulmans et chrétiens se retrouvent. Sans oublier la question phare du moment, celle des migrants. D’un atelier à l’autre, une idée revient : soyons attentifs à la complexité. Les belles paroles, la générosité sont une chose. Mais la réalité est protéiforme, compliquée, perturbante parfois. « Recevoir et accueillir des migrants issus de l’ex-Yougoslavie, c’est être confrontés à des populations qui ont appris à se haïr », rappelle une bénévole lyonnaise. De même pour des migrants issus du Proche ou du Moyen Orient qui ne forment pas tous une seule et même famille. Pas plus qu’il ne convient de confondre berbères et kabyles. Parler de religion dans les espaces publics et notamment les établissements scolaires, c’est être confronté parfois à des échanges vifs, où il faut savoir être médiateur, montrer aux uns et aux autres que les choses ne sont pas si simples. Aborder la complexité, c’est connaître l’autre et se connaître soi-même. « On essaye de prendre un thème très cadré, une thématique très précise, ou encore de focaliser sur les questions d’éthique et du vivre ensemble pour éviter que les discussions ne dérivent », explique une animatrice. Car de l’échange autour de la religion on passe très vite au politique, aux opinions et aux conflits.

Tandis que les 130 ateliers officiels tournent dans les salles, un atelier clandestin se forme dans les couloirs. Autour de Pie Tshibanda, un groupe de bénévoles des Semaines sociales refait le monde, rêve d’une autre Afrique. Mais on peut être tous bénévoles des Semaines sociales et avoir de profonds désaccords. Sur la politique, la démographie, les moyens d’aider l’Afrique à se relever, les opinions se confrontent, s’opposent. Parfois aux limites de la crispation.

On vous l’avait bien dit : il faut être attentif à la complexité !

[…]

Télécharger le texte qui retranscrit les différents ateliers

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