Dossier Rencontres anuelles

Synthèse de la session 1998

Synthèse de la session 1998 des Semaines sociales de France, « Démocratiser la République, représentation et participation du citoyen »

Luc Ziegler

La 73e session des semaines sociales de France a été consacrée à l’inventaire de la crise de la démocratie et à la recherche de voies nouvelles pour construire son avenir.

Un regard sur l’histoire a permis tout d’abord de mettre en lumière les limites et les paradoxes de la démocratie et de définir les valeurs qui la sous-tendent. Mais ces valeurs ne sont pas innées ; encore faut-il consentir un effort pour y adhérer et les faire partager ; c’est tout l’enjeu de l’éducation à la démocratie. De plus, la démocratie n’est pas un invariant. Elle doit s’adapter à un univers qui évolue et se complexifie. Aujourd’hui elle s’interroge sur les attentes du citoyen qui entend être reconnu dans sa singularité au sein d’une réalité sociale en pleine évolution, bouleversée par les techniques et les nouvelles mentalités.

Parmi les nouveaux éléments qui pèsent sur les sphères privées et publiques, la référence à l’opinion et la contrainte économique tiennent une place particulière. L’une comme l’autre renouvellent le processus démocratique, mais elles peuvent aussi le dévoyer. Le sondage n’est pas le suffrage. L’administration des choses ne peut se substituer au gouvernement des hommes. En ce sens, le danger est de diluer le pouvoir politique au point de vider la démocratie de toute substance, ce qui explique en partie cette forme d’anémie observée de nos jours. Le péril ne serait donc pas en dehors de la démocratie, mais en son sein, dans son fonctionnement même.

Comment alors revitaliser la démocratie, renouveler les institutions, entretenir chez le citoyen le goût de la démocratie et la volonté de participer à l’œuvre collective ? Cela ne va pas de soi dans un pays tel que la France, plus à l’aise dans le combat que dans le débat, dans la loi que dans le contrat ; en somme, plus attaché à la République qu’à la démocratie.

La démocratie, histoire et actualité

La démocratie est doublement fille de l’histoire : d’abord parce que son idée même s’est formée progressivement, ensuite parce que des avancées spectaculaires ont alterné avec des défaites sévères.

Au XXe siècle en Europe, les contrastes ont été puissants. Dans les années trente, la démocratie était attaquée par le totalitarisme brun ; puis, dans les années cinquante par le totalitarisme rouge. Elle en est pourtant sortie victorieuse. En France, si le régime de Vichy a imposé une éclipse de quatre années à la démocratie, celle-ci a en revanche surmonté les crises qui auraient pu l’emporter en 1947, 1958, 1968. Apparemment, aujourd’hui, la démocratie n’a plus d’ennemis en France ni en Europe: elle est devenue la règle commune aux membres de l’Union.

Dans le monde, au cours des trente dernières années, la démocratie a multiplié les victoires sur des régimes contraires : dans les années 1970, sur le pourtour de la Méditerranée septentrionale, dans les années 1980, en Amérique latine, en 1989 et après, avec l’effondrement des régimes communistes de l’Est européen.

Davantage que victorieuse sur le plan géographique, la démocratie a aussi triomphé sur le plan des idées. La démocratie est en effet devenue le seul principe de légitimité qui puisse se prévaloir d’un consentement quasi universel, la seule norme par rapport à laquelle les conduites sont jugées. Car, bien au-delà du choix d’un régime, la démocratie implique un système philosophique, un ordre social, un ensemble de valeurs : garantie de liberté, aspiration à l’égalité, exigence d’universalité.

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